Polémique sur les besoins d'emploi auprès des âgés

TSA : 05/11/2014

L'association des directeurs au service des personnes âgées (AD-PA) appelle à créer 200 000 postes au profit des usagers. A ses yeux, la situation est en effet devenue « intolérable », à domicile comme en établissement. Réponse ulcérée des établissements privés, représentés par le Synerpa : cet état des lieux est « scandaleux ».
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« On est sur le Titanic et on demande aux directeurs de faire jouer la musique plus fort. Mais nous ne le ferons pas ! » Avec son sens acéré de la formule, Pascal Champvert, le président de l'AD-PA, alerte une nouvelle fois sur les besoins de recrutement des établissements, des services à domicile et des coordinations pour personnes âgées. Et cette fois, à l'en croire, l‘iceberg est en vue.
« Manger en dix minutes »

Dans un « Plan emploi autonomie » de six pages, publié le 3 novembre, l'association énumère « ce qui est intolérable » aujourd'hui : « des personnes âgées à domicile ou en établissement qui doivent manger en dix minutes » ou « doivent porter des protections urinaires alors qu'elles pourraient aller aux toilettes », mais aussi « des familles souvent poussées à l'épuisement »… Or dans le même temps, le secteur déplore « des suppressions d'emplois à domicile et en établissement par insuffisances de financement dans une période comptant des millions de chômeurs ».
« C'est de l'ordre d'une maltraitance sociétale », a renchéri Pascal Champvert sur RTL - dont le site internet retenait, le 3 novembre, que « neuf maisons de retraite sur dix n'ont pas les moyens d'accueillir leurs pensionnaires dans de bonnes conditions ». « Dans beaucoup de structures les budgets n'augmentent plus, ce qui revient à une diminution, compte tenu de la hausse des salaires et des prix », précise le président à TSA. « Au final, ce sont les professionnels qui paient, par des maladies et des accidents du travail, et donc les usagers, et leurs familles. »
7 milliards d'euros

L'AD-PA demande en conséquence de créer 200 000 emplois au profit des personnes âgées. Et comment permettre ces recrutements ? L'association propose deux financements, pour un total de 7 milliards d'euros. D'une part, autant d'embauches permettraient de réaliser 2,5 milliards d'économies sur les allocations chômage ; d'autre part, 4 milliards pourraient être « remboursés par l'Assurance maladie et l'Etat sur les crédits repris dans le budget de la CNSA », au titre de la contribution solidarité autonomie (CAS) et de la contribution additionnelle de solidarité pour l'autonomie (Casa), est-il précisé dans le document. Dans son communiqué, l'AD-PA invite même les départements à ajouter 500 millions d'euros de remboursements.
L'association, qui rassemble des directeurs de structures publiques et privées, lance enfin deux pistes supplémentaires de financement : l'instauration d'une taxe sur les successions, idée que le Conseil économique social et environnemental avait approuvée à l'unanimité en 2011 ; un allègement de cotisations sociales, pour les structures associatives et publiques ne bénéficiant pas du Crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi (CICE).
« Une offense »

« Scandaleux », rétorque le Syndicat national des établissements et résidences privées pour personnes âgées (Synerpa). Dans un communiqué, le 4 novembre, sa déléguée générale Florence Arnaiz-Maumé juge « inacceptable de dire que neuf maisons de retraite sur dix ne sont pas en mesure de bien s'occuper de leurs résidents – c'est une offense faite à toutes les équipes ». Elle estime aussi « inacceptable de dire que la situation s'est dégradée depuis vingt ans », alors que le secteur s'est professionnalisé au point de devenir « l'un des meilleurs au monde ». Et elle trouve encore « scandaleux de dire que l'Etat interdit d'embaucher », alors que « le secteur privé, soit un peu plus d'un cinquième des maisons de retraites, propose à lui seul 8 000 offres d'emploi ». Au fond, écrit le Synerpa, les propos de Pascal Champvert « discréditent un secteur entier ».
Dans leurs efforts pour recruter, les structures commerciales et non lucratives se trouvent manifestement des handicaps bien différents : pour les premiers, un problème d'image, pour les seconds, un manque de financements.

Par Olivier Bonnin